C’est quoi, la bonne longueur ?

Cela faisait déjà deux heures que je me laissais bercer par le roulis de ce train mesurant la longueur des rails à travers la campagne française… Je voyais défiler le paysage et cela m’a soudain rappelé deux choses : un petit texte assez spécial (nous y reviendrons d’ici peu) qui décrivait ce genre de voyage, mais aussi cette éternelle question qui germe dans l’esprit de chaque auteur à l’un ou l’autre moment de sa vie : quelle est la bonne longueur ? Non ! Je vous vois venir ! Il n’est pas question de cela !

Longueur ou langueur monotone ?

Quelle longueur, cette voie, dans un train verrou... vers où ?

Enfermé dans un train verrou… vers où ?

Quelle est la durée valable pour un voyage en train ? La bonne longueur d’un train… Ou d’un rail ? Combien de mots pour l’article de ce blog, de centimètres d’épaisseur pour ce roman ou de lignes pour cette nouvelle ? Et dans tout texte, quelle est donc la longueur étalon pour une bonne phrase ? Cela peut sembler étrange, mais vous n’imaginez pas combien de fois j’ai entendu cette question, en atelier d’écriture, en discutant avec des auteurs, dans des commentaires de blogueurs. Pourtant, comme bien souvent, ce n’est pas la longueur de la chose qui importe, mais bien la manière dont on s’en sert.

Longueur de phrases, un indice de virtuosité ?

On se moque souvent de ceux, réputés analphabètes de la rédaction, qui n’écrivent que des successions de phrases courtes à l’invariable structure « sujet, verbe, complément ». À l’inverse, les grandiloquents qui étalent des phrases à n’en plus finir rendent fous les lecteurs lambda. On pourrait dire que la longueur idéale se trouve à mi-chemin entre ces deux extrêmes, mais en ne visant que la moyenne, on reste souvent moyen.

Le rythme est important. Une action rapide s’enchaîne par des phrases simples aux mots courts, souvent monosyllabiques. Plus c’est court, plus ça court. Rappelez-vous la course du pendule: Plus il est court, plus il balance vite. Plus il est long, plus il se promène à son aise.

Un Alexandrin, c'est quelle longueur en centimètres ?

Un Alexandrin, c’est bien 12 pieds ? Ça fait combien en cm ?

On en déduit facilement que les phrases longues, articulées autour de mots plurisyllabiques serviront mieux la narration, les descriptions, les états d’âme, le cours des saisons, les natures mortes.

C’est assez vrai, dans la plupart des cas. Mais méfiez-vous des caricatures. Les recettes sont faites pour se décliner à toutes les sauces.

Osez ! Innovez ! Jouez-vous des longueurs !

Si je vous reparle de ce petit texte, c’est pour vous prouver qu’on peut casser les codes, faire sauter les règles. Statiques les longues phrases ? Exclusivement réservées à de longues descriptions figées sans la moindre action, pas même le frémissement d’une feuille ?

Je vais vous raconter une histoire, celle d’un type en colère qui explique son périple à travers la France et toutes ses embuches, une histoire mouvementée pleine de rebondissements et de rancoeur. Mais tout cela en une seule phrase… Une phrase d’une page, quand même.

C’est là, sur BabelWeb, site littéraire que vous connaissez déjà (cf. répétoscope) 🙂

Clic –> L’invitation : Je ne t’écrirai qu’une seule phrase… <– Clic

Alors ? Belle randonnée ? Je ferme cette parenthèse. Mon train arrive en gare. Finie la belle campagne française. Et heureusement, cette fois, il y a quelqu’un au rendez-vous. Merci de m’avoir écouté, ça a considérablement réduit la longueur apparente de ce voyage 🙂

À vous, maintenant : Lorsque vous écrivez, c’est plutôt style télégraphique, ou bien faites-vous dans la longueur ?

  1. Bonjour Thierry, je ne fais jamais attention à la longueur de mes phrases. Mon intention est d’être la plus claire possible. J’écris puis je me relis; si je sens que je peux améliorer, je cherche sinon je valide.

    zenie

    • Bonjour Zenie,

      Avoir un message et être ensuite capable de le transmettre clairement est effectivement plus important que la longueur des phrases.
      Pour cette dernière, la question ne se pose que… quand on se la pose 😉

      À bientôt

  2. Bonjour Thierry,
    Il y a 1 mois 1/2 j’ai raconté sur mon blog une histoire extraordinaire http://bel-et-bien.net/bien-etre/histoire-extraordinaire-chine/
    Cet article m’a paru très long mais je ne pouvais pas raccourcir sans quoi je ne pouvais plus exprimer ce que j’avais ressenti et à ma grande surprise j’ai eu beaucoup de commentaires plutôt élogieux.
    Quant à la longueur des phrases, j’ai fait comme je l’ai senti, puis à la relecture j’ai raccourcie certaines phrases trop lourdes.
    Si j’avais lu ton article avant j’aurais sans doute fait différemment.
    Ce sera pour ma prochaine histoire.
    Belle et douce journée.
    Danièle

    • Bonjour Danièle,

      J’ai lu ton histoire extraordinaire… Aventurière, hein ? 🙂

      J’ai eu une période où je pensais ne rien pouvoir enlever d’un texte que je venais d’écrire. J’ai appris depuis qu’il est toujours possible de compacter sa prose pour en enlever les longueurs inutiles et que le résultat est toujours meilleur.

      Tout est une question de rythme 🙂

      À bientôt

  3. Bonjour Thierry,
    Habituellement, quand il ne s’agit pas de recettes -et encore ! je fais plutôt dans la longueur. J’aime m’attarder sur les mots, les synonymes. Les répétitions jouent alors de leur musicalité et renforcent les effets. Mais je fais aussi attention à ne pas perdre mes lecteurs et à rester intéressante. Mais l’intérêt est subjectif, non ?
    En tous cas, très peu pour moi, le style télégraphique, tronqué et insipide des textos…
    A bientôt !

    • Bonjour Bernadette,

      Oh, quand je parle de phrases courtes, il n’est jamais question de style SMS, que le Grand Tout m’en préserve ! 🙂
      Mais je suis comme toi amoureux du mot juste, de la phrase bien tournée, de la musicalité de l’ensemble.
      Et comme la musique peut se jouer piano ou allegro, la prose peut aussi jouir de variations rythmiques selon les besoins.

      À bientôt

  4. Thierry, ton article me parle.

    En effet, amoureux des mots et des idées, j’aime écrire.
    Depuis toujours.

    Un régal ces longues phrases enrichies de mille détails.

    Mais ça… c’était avant.
    Avant mon arrivée sur le web.
    Et le démarrage du blog Moralotop.

    Depuis, tout a changé.
    Le style.
    La longueur des phrases.
    Le rythme.
    Et même le début des phrases.
    Tout.

    Une seule chose ne change pas, le changement.

    Je suis en train d’écrire une histoire pour la très prochaine version du blog.
    Sur le même principe.

    Alors, oui, on peut faire court avec une longue histoire… une histoire au long cours !

  5. Bonjour Thierry

    Amoureuse aussi de la belle langue française je reste parfois pantoise devant le style bâclé de certains articles du web

    Doit-on les bâcler parce plus personne ne fait plus attention à ça ? Je ne crois pas il me semble que les articles bien écrits trouvent toujours leur place car nous sommes encore nombreux à faire attention aux fautes d’orthographe et au style de certains blogueurs.

    La longueur pour moi importe peu dès que le style est enlevé et l’histoire intéressante

    J’adore Douglas Kennedy et viens juste de lire son premier romain eh bien il s’est vraiment « bonifié » au fils des parutions car j’ai eu beaucoup de mal à terminer le premier

Laisser un commentaire


NOTE - Vous pouvez utiliser les éléments et attributs HTML tags and attributes:
<a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <s> <strike> <strong>